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Amatora mu Mahoro: Système de monitoring des principes démocratiques et de prévention de la violence électorale 2eme

Introduction

Le projet Amatora Mu Mahoro présente son deuxième rapport dans un contexte d’impasse politique et d’insécurité grandissante. Ce deuxième rapport se base sur les résultats des indicateurs relatifs aux initiatives de paix et aux incidents vérifiés de violence électorale, du 26 avril au 30 mai. Les élections communales du 24 mai constituent le premier moment et une étape cruciale d’une série de cinq scrutins.

Le présent rapport tente de mettre en lumière les causes de l’impasse politique qui règne actuellement au Burundi, par l’analyse des incidents liés aux enjeux électoraux recensés et des perceptions de la situation par les points focaux du projet présents dans toutes les communes du pays.

Il importe de rappeler les événements majeurs du contexte actuel:

La campagne pour les élections communales a démarré le 5 mai et a pris fin le 18 mai à 18 heures. La première semaine de la campagne s’est globalement passée dans le calme. La deuxième semaine a toutefois vu un surcroit de tensions, par des assassinats à dimension politique, des affrontements et des harcèlements verbaux entre des différents partis politiques.

Pendant la campagne électorale, plusieurs initiatives de paix ont été menées par les ONG nationales et internationales, les organisations religieuses et le gouvernement. La Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) a su, à plusieurs reprises, résoudre avec succès les disputes entre les partis politiques sur les lieux de la campagne.

Dans la soirée de la veille du scrutin, initialement prévu pour le 21 mai, la CENI a décidé de reporter les élections de 48 heures, puis de 72 heures, au 24 mai 2010. Ce report était motivé par des raisons logistiques et il n’y a pas eu de contestations.

Le scrutin du 24 mai s’est déroulé dans le calme et la sérénité sur toute l’étendue du territoire national selon les observateurs nationaux[1] et internationaux, les confessions religieuses et les médias. Avec l’annonce des premiers résultats via les médias, le lendemain du scrutin, huit partis politiques ont rejeté les résultats. Par la suite, 12 partis[2] d’opposition se sont unis pour créer l’Alliance Démocratique pour le Changement dénommée ADC-Ikibiri.

Les résultats provisoires annoncés par la CENI le 28 mai placèrent le CNDD-FDD comme vainqueur avec 64.03% de suffrages au niveau national. Le parti FNL venait en deuxième position avec 14.15% suivi par l’UPRONA avec 6.25% ; le parti SAHWANYA FRODEBU arrivait en 4ème position avec 5.43% et le MSD en 5ème avec 3.75%.

L’ADC-Ikibiri et le parti UPRONA -lequel n’avait cependant pas rejoint l’alliance de l’opposition-, reprochèrent à la CENI d’être complice du CNDD-FDD dans l’organisation de « fraudes massives » des élections du 24 mai 2010. Les 13 partis contestataires ont alors réclamé la dissolution de la CENI, l’annulation des résultats et la tenue de nouvelles élections communales. La CENI et ses démembrements réfutèrent néanmoins l’ensemble de ces accusations. Les recours introduits auprès des Commissions Electorales Provinciales Indépendantes (CEPI) ont été systématiquement rejetés par ces dernières, statuant qu’aucune preuve matérielle de fraude n’avait été apportée par les plaignants. Ils prirent en témoins les mandataires de ces partis, présents sur les bureaux de vote pour observer le déroulement du scrutin.

Avant même que les CEPI se prononcent sur ces recours, les présidents des partis FRODEBU, FNL, CNDD, MSD et UPD ont procédé, le 2 juin, au retrait de leurs dossiers de candidature aux élections présidentielles prévues le 28 juin 2010. L’UPRONA leur emboita le pas le 5 juin 2010, laissant ainsi le candidat du CNDD-FDD seul dans la compétition. La CENI prit position face à ces retraits en déclarant que le calendrier électoral serait maintenu même s’il resterait une seule candidature au scrutin présidentiel.

Les premiers affrontements entre la police et les militants de l’opposition ont eu lieu samedi 29 mai au nord de la capitale. Selon ces militants, des urnes remplies de bulletins de vote avaient été découvertes à Kinama. Des dizaines de personnes ont été arrêtées à la suite de ces affrontements et certaines ont été par la suite écrouées à la prison centrale de Mpimba.

La tension a continué à monter suite à la déclaration du Ministre de l’Intérieur selon laquelle seuls les partis ayant présenté un candidat seraient autorisés à participer à la campagne présidentielle ; les autres se sont ainsi vus interdits de tenir des réunions politiques. En conséquence, une réunion de l’alliance ADC-Ikibiri a été interdite par la police le 7 juin 2010 dans la commune de Gashikanwa à Ngozi.

Dans la soirée du 12 juin, premier jour de la campagne présidentielle, des grenades ont été lancées sur des places publiques à Bujumbura blessant au moins cinq personnes. Les attentats à la grenade ont continué toute la semaine à Bujumbura comme à l’intérieur du pays ; des permanences du CNDD-FDD ont été incendiées ici et là dans les provinces. La campagne présidentielle se déroule ainsi dans un climat de tension où les électeurs subissent la pression contradictoire des chefs politiques : la mouvance présidentielle les invitant à se rendre en masse aux urnes et l’opposition les incitant au contraire à boycotter les élections.

Toutefois, des tentatives de rapprochement ont eu lieu afin de renouer avec le dialogue entre les partis politiques et la CENI. Ainsi, sur l’initiative du Conseil National des Bashingantahe en collaboration avec la Coalition de la Société Civile pour le Monitoring des Elections (COSOME), un atelier de réflexion sur l’évolution du processus électoral au Burundi est organisé à Bujumbura le 8 juin 2010. A ce forum d’échange ont pris part certains représentants des partis politiques dont l’UPRONA, le PIT, le CNDD, ADR, FNL, MSD, et quelques organisations de la société civile. Des recommandations ont été formulées aux partis politiques et à la CENI en vue de renouer avec le dialogue et sortir de cette impasse politique. Il faut enfin noter également les prises de positions unanimes des missions diplomatiques, des églises et de la société civile appelant les acteurs politiques au dialogue et à la préservation des acquis du processus de paix.

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[1] Voir à ce titre les déclarations préliminaires des organisations nationales suivantes : COSOME, CEJP, OLUCOME, OAP, OADAME, Fontaine ISOKO, Duhirehamwe

[2] ADR-IMVUGAKURI, CDP, CNDD, FEDS-SANGIRA, FNL, MSD, PARENA, PIT, PPDRR-BAVANDIMWE, RADEBU, SAHWANYA-FRODEBU, UPD-ZIGAMIBANGA